Envoie même plus de troupes (et vas-y toi-même) !

D’abord merci pour ton discours à la nation [discours de G.W Bush du mercredi 10 janvier 2007], c’est bon de savoir que tu nous parles encore après ce qu’on t’a manigancé en novembre 2006 [allusion à la défaite électorale des républicains lors des élections de mid-term, aboutissant à une double majorité démocrate dans les deux chambres]. Ecoute, puis-je être franc ? Envoyer encore 20’000 hommes, cela ne va pas permettre de faire le boulot. Cela impliquerait seulement de ramener le nombre de soldats au niveau de l’année dernière. Et, nous, l’année dernière on était déjà en train de perdre ! Plus d’un million de soldats a déjà servi un certain temps en Irak depuis 2003. Quelques milliers de plus c’est loin d’être suffisant pour trouver les armes de destruction massive qu’on cherche ! Enfin, je veux dire... pour trouver les coupables du 11 septembre et les traîner en justice ! Non, excuse-moi, raye cela ! Essaye cela : apporter la démocratie au Moyen-Orient ! Oui ! Président, il faut montrer beaucoup plus de courage, mon vieux. Celle là il faut la gagner. Diantre, tu as eu Saddam, non ? Tu l’as pendu haut et court ! J’ai aimé regarder cette vidéo, comme au temps de ce bon vieux et farouche Far-West. Le mauvais habillé de noir ! Les bourreaux étaient aussi cinglés que les pendus ! Les lois du lynchage public ! Ecoute-moi, je dois le reconnaître, je suis embêté par la situation fâcheuse dans laquelle tu t’es fourré. Comme l’a dit un jour Ricky Bobby [allusion au film : Ricky Bobby, Roi du circuit], si tu n’es pas le premier, tu es le dernier. Et, sincèrement, le fait que tu sois humilié d’une telle façon devant le monde entier, ça ne nous apporte rien de bon, à nous les Américains. Monsieur le chef, écoute-moi. Ce n’est pas des milliers, c’est des millions de soldats que tu dois envoyer en Irak. La seule façon de se sortir du bourbier cette fois c’est d’inonder l’Irak avec des millions de nous autres ! Je suis au courant que tu es à court de soldats prêts au combat, alors regarde un peu autour de toi. La seule façon de battre un pays de 27 millions d’habitants, l’Irak, c’est d’y envoyer au moins 28 millions d’Américains. Voilà, comment cela pourrait marcher : Sur les 27 premiers millions, chacun liquide un Irakien. Cela permettra de prendre soin, rapidement, de la rébellion. L’autre million d’entre nous restera sur place et reconstruira le pays. Simple, non ? Je sais ce que tu vas me dire maintenant : où je les trouve les 28 millions d’Américains prêts à partir en Irak ? Voici quelques suggestions. 1. Déjà plus de 62 millions d’Américains ont voté pour toi lors des élections qui ont eu lieu, alors que nous étions engagés dans la guerre depuis un an et demi, et que l’on savait déjà qu’on allait la perdre. Je suis sûr qu’au moins un tiers d’entre eux sera disponible pour mettre son propre corps là où il a déjà mis son vote, et qu’ils vont s’engager comme volontaires. J’en connais un paquet, et, bien que l’on puisse diverger politiquement, je suis sûr que ce n’est pas le genre à croire que quelqu’un d’autre doive y aller, à leur place, pour combattre et mener leur combat - alors qu’eux se planqueraient aux Etats-Unis. 2. Commence une campagne de rassemblements dans les villes du pays sur le thème : « Dérouille un irakien ». Je sais que cela fait trop style début du XXIe siècle. Mais j’ai déjà assisté à une de ces fêtes données par Lou Dobbs [un des animateurs les plus connus de talk-show qui opère, entre autres, sur la chaîne CNN]. Et, je te le jure, tu serais étonné de voir que nombre d’idées les plus brillantes surgissent après le troisième mojito [un type de cocktail]. Je suis certain que le résultat de cet effort sera à hauteur de quelque cinq millions d’engagés supplémentaires. 3. Envoie en Irak tous les journalistes des médias dominants. Après tout, ils ont collaboré avec toi pour nous apporter cette guerre. Et un bon tas est déjà entraîné. En effet, ils étaient embedded [journaliste embarqué avec les troupes américaines dans leurs véhicules] ! Après ça, si on n’en est pas encore aux 28 millions, incorpore tous les téléspectateurs de Fox News [la chaîne de TV des néo-conservateurs]. Monsieur le Président Bush, ce n’est pas le moment de lâcher ! C’est le moment d’en mettre un bon coup ! Donc ne va pas faire la femmelette en envoyant quelques milliers de troupes déjà très fatiguées. Pars avec ton peuple et conduis-le toi-même, comme un vrai commandant en chef ! Ne laisse aucun conservateur derrière ! En avant, à pleins tubes ! Nous promettons de t’écrire. Va de l’avant, avec eux.

Affectueusement, ton Michael Moore (Traduction A l’encontre)

* Michael Moore n’est plus à présenter. Cette lettre ouverte, datée du 10 janvier 2007, se trouve sur le site http://www.michaelmoore.com