Abbas, six ans, a voulu ramasser un objet qui ressemblait à une bouteille de parfum...

Abbas, six ans, a voulu ramasser un objet qui ressemblait à une bouteille de parfum...

1er septembre 2006

Abbas Yusef Shibli, six ans, a décrit aux délégués d’Amnesty International ce qui s’est passé quand il a tenté de ramasser une bombe à sous-munitions qui n’avait pas explosé dans le village de Blida, le 26 août. De son lit d’hôpital, Abbas a expliqué qu’il était en train de jouer avec trois camarades ; il avait voulu ramasser un objet qui ressemblait à une « bouteille de parfum » . Abbas a été victime d’une rupture du colon et de la vésicule biliaire, il a un poumon perforé, le nerf médian a été touché, il a déjà subi deux transfusions sanguines. Ses trois camarades ont aussi été blessés, mais ont quitté l’hôpital au bout de deux jours.

Dans la chambre voisine, Mahmoud Yaqoub, trente-huit ans, berger, est allongé, une jambe dans le plâtre après avoir marché sur une bombe à sous-munitions. Mahmoud dit avoir perdu quatre de ses 21 chèvres au cours des attaques israéliennes parce que les bêtes ne pouvaient accéder à l’eau. Il ne pouvait que rarement les faire sortir durant les combats ; maintenant que le cessez-le-feu est en vigueur, des bombes à sous-munitions se trouvent sur toutes les collines qui leur servent normalement de pâturage.

Dans un autre hôpital, les délégués d’Amnesty International se sont rendus au chevet de Hassan Hussein Hamadi, treize ans, dans le coma après avoir subi une intervention chirurgicale. Selon sa famille, Hassan Hussein et ses cinq frères et soeurs jouaient dans la cour de leur maison dans le village de Deir al Qanun, au sud de Tyr. Hassan Hussein aurait ramassé une petite bombe à sous-munitions qui aurait explosé. L’explosion lui a arraché quatre doigts de la main droite, sauf le petit doigt et il souffre de lésions importantes à l’épaule et à l’abdomen.

Hussein Qaduh, dix-neuf ans, étudiant en comptabilité à l’Institut technique islamique de Beyrouth a été gravement blessé par l’explosion d’une bombe à sous-munitions le 28 août, dans le village de Soultaniye, au sud du Liban, alors qu’il suivait une allée près du terrain de football, dans le village. Lorsque les délégués d’Amnesty International se sont rendus sur place le lendemain, ils ont constaté que l’endroit était parsemé de bombes à sous-munitions non explosées, certaines à quelques centimètres de l’allée sur laquelle on voyait encore des traces de sang. Hussein, victime d’une hémorragie au niveau des intestins et du foie, a subi une importante intervention chirurgicale. L’hémorragie a pu être stoppée mais des saignements persistent au niveau du cerveau. Son pronostic vital est extrêmement réservé.

Amnesty International a répété que l’utilisation par Israël de bombes à sous-munitions soulignait la nécessité, pour les Nations unies, de mener sans délai une enquête approfondie sur toutes les violations du droit international humanitaire, commises à la fois par Israël et par le Hezbollah au cours de ce conflit.

Amnesty International a appelé Israël, le jeudi 31 août, à fournir sans délai les cartes des régions du Liban dans lesquelles des bombes à sous-munitions ont été utilisées au cours du récent conflit, afin de faciliter leur enlèvement et d’empêcher de nouvelles victimes civiles.

L’organisation a rendu publics les témoignages de victimes de bombes à sous-munitions qui n’avaient pas explosé au moment de leur impact et appelé Israël à coopérer à une enquête impartiale et approfondie sur l’utilisation de ce type de munitions au cours du récent conflit.

Ces appels interviennent après la publication d’un rapport des Nations unies qui a révélé que 90 p. cent des frappes israéliennes utilisant des bombes à sous-munitions se sont produites au cours des dernières soixante-douze heures du conflit, alors qu’un cessez-le-feu était en vue.

Le Centre de coordination de l’action contre les mines des Nations unies a identifié à ce jour plus de 400 points contaminés par plusieurs centaines de milliers de petites bombes contenues dans ce type de munitions.

Les délégués d’Amnesty International au Liban ont trouvé d’innombrables bombes à sous-munitions non encore explosées dans les villages et même parfois dans les maisons.

« L’utilisation de bombes à sous-munitions au coeur de zones habitées viole clairement l’interdiction de toute attaque menée sans discrimination et constitue donc une grave violation du droit international humanitaire, a déclaré Kate Gilmore, secrétaire générale adjointe exécutive d’Amnesty International. Il est scandaleux qu’en dépit des demandes officielles des Nations unies, Israël n’ait toujours pas fourni de cartes pour les régions visées par des bombes à sous-munitions. Cette situation met en danger la vie de civils libanais, d’enfants en particulier. »

Les bombes à sous-munitions libèrent en l’air plusieurs centaines de petites bombes sur une large zone. Ces bombes n’explosent pas nécessairement lors de leur impact, faisant ainsi planer une menace durable pour la population civile.

« Les bombes à sous-munitions sont de fait des mines antipersonnel. Leur utilisation par l’armée israélienne au Liban a déjà fait de nombreuses victimes parmi les centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants qui cherchaient à regagner leur domicile. Les États-Unis d’Amérique, principal fournisseur d’armes à Israël, ainsi que les autres pays ne devraient plus fournir ce type d’armes et devraient décréter un moratoire international sur leur utilisation », a déclaré Kate Gilmore.