Irak et Al-Qaïda : Bush avait menti

Irak et Al-Qaïda : Bush avait menti

NOUVELOBS.COM | 09.09.06 |

Selon un rapport du Sénat américain, les liens entre Al-Qaïda et Saddam Hussein, prétexte à la guerre en Irak, étaient inexistants.

Rien ne prouve que Saddam Hussein ait été lié au terroriste d’origine jordanienne Abou Moussab al-Zarqaoui et à ses membres du réseau Al-Qaïda, selon un rapport rendu public vendredi 8 septembre par la Commission du renseignement du Sénat américain. Les conclusions de ce rapport, selon les Démocrates, battent en brèche les justifications fournies par le président George W. Bush pour lancer la guerre en Irak en mars 2003.

Le document cite un rapport de la CIA, datant d’octobre 2005, selon lequel le régime de Saddam Hussein "n’avait pas de relations" avec "Al-Zarqaoui et ses associés". Il ne les pas non plus "accueillis" et n’a pas "fermé les yeux" sur leurs activités.

George W. Bush et d’autres responsables de son administration ont affirmé que la présence de Zarqaoui en Irak avant la guerre constituait la preuve des liens entre le gouvernement de Saddam Hussein et Al-Qaïda. Le terroriste d’origine jordanienne a été tué en juin dernier par un bombardement américain.

Saddam Hussein "se méfiait d’Al-Qaïda"

Aussi récemment que lors d’une conférence de presse le 21 août dernier, le président a évoqué le risque qui avait existé de voir une situation où Saddam Hussein aurait la capacité de produire des armes de destruction massive et entretenant "des relations avec Zarqaoui".

Au contraire, selon le rapport, des éléments rassemblés après le début de la guerre indiquent que Saddam Hussein "se méfiait d’Al-Qaïda et considérait les extrémistes islamistes comme une menace contre son régime". Si Zarqaoui se trouvait bien à Bagdad entre mai et fin novembre 2002, ces renseignements indiquent en outre "que Saddam Hussein a tenté, sans succès, de localiser et de capturer Zarqaoui".

Cependant, la raïs déchu a déclaré aux autorités américaines, après sa capture, que des responsables de son régime avaient rencontré Oussama ben Laden, même si son gouvernement n’avait jamais coopéré avec le chef d’Al-Qaïda, selon des informations du FBI citées dans le rapport. Par ailleurs, Tarek Aziz, l’ancien vice-Premier ministre irakien et proche de Saddam Hussein, a déclaré au FBI que "Saddam n’exprimait que des sentiments négatifs sur Ben Laden".

Armes de destruction massives

Selon le rapport, les informations recueillies après la guerre ne confirment pas non plus les renseignements datant d’avant la guerre selon lesquels l’Irak était en train de relancer son programme d’armement nucléaire et possédait des armes de destruction massives bactériologiques ou chimiques. Le rapport affirme également que les opposants du Congrès national irakien ont tenté d’influencer la position américaine grâce à de fausses informations et que ces informations ont été utilisées malgré des doutes émis au sein des services de renseignement américains.

Selon le sénateur démocrate Carl Levin, un des membres de la Commission, ce rapport constitue une "mise en accusation dévastatrice" pour l’administration Bush. La guerre en Irak est un élément crucial de la lutte contre le terrorisme, fait valoir le chef de la Maison Blanche, un point de vue désormais contesté par de nombreux Américains.

D’après une enquête CNN rendue publique mercredi, 43% des personnes interrogées doutent que le conflit en Irak soit capital dans la lutte contre le terrorisme, tandis que 45% pensent le contraire.

Ce sondage a été réalisé du 30 août au 2 septembre auprès d’un échantillon d’un millier d’adultes aux Etats-Unis.

Bush "a exploité le profond sentiment d’insécurité"

Pour le sénateur démocrate John Rockefeller, vice-président de la Commission sénatoriale, l’administration Bush "a exploité le profond sentiment d’insécurité des Américains" après les attentats du 11 septembre 2001, "amenant une grande majorité des Américains à croire, contrairement aux évaluations des services de renseignement à ce moment, que l’Irak avait un rôle dans les attentats".

Il est de notoriété publique que les informations recueillies avant la guerre en Irak ont constitué un "échec tragique" pour les services de renseignement américains, a de son côté noté le sénateur républicain Pat Roberts, président de la Commission. Il a toutefois reproché aux Démocrates de se servir du rapport à des fins politiques, à quelques semaines des élections de la mi-mandat.

Le porte-parole de la Maison Blanche, Tony Snow, a pour sa part estimé qu’il n’y avait "rien de nouveau" dans le rapport.